Attributs étendus
Les systèmes de fichiers ext2 et ext3 (ainsi que reiserfs dans certaines conditions) offrent la possibilité de donner à des fichiers (fichiers réels ou répertoires) des attributs étendus qui s'ajoutent aux permissions classiques POSIX.1, éventuellement complétées par les permissions étendues ACL.
<cadre type="alert">Seuls ces systèmes de fichiers offrant ces attributs, il n'est pas prudent ─ en terme de sécurité ─ de s'appuyer lourdement sur leur présence si l'on est amené à transférer fréquemment des données d'un système de fichiers ext à un autre. D'autre part, il convient de tester ces possibilités : toutes les versions du noyau n'en tiennent pas compte de la même manière.</cadre>
Mise en place
Il n'y a rien à faire pour des partitions en ext2 ou ext3, qui respectent nativement les attributs étendus.
Chose assez peu connue, cependant, le système de fichiers reiserfs peut respecter les attributs étendus, à condition d'être monté avec l'option idoine attrs
. Pour ce faire, les commandes suivantes sont appliquées :
- sur une partition non encore montée :
mount -t reiserfs -o attrs /dev/partition /point/de/montage
; - sur une partition déjà montée :
mount -o attrs /point/de/montage
(remontage à la volée).
Pour que la prise en compte soit effective à chaque montage automatique (le cas échéant), il faut ajouter l'option dans /etc/fstab. Par exemple :
/dev/hda1 / reiserfs defaults,acl,attrs 0 1
Enfin, on peut recompiler son noyau avec l'option CONFIG_REISERFS_FS_XATTR = y
pour que le mode attr
soit automatiquement appliqué lors du montage d'une partition en reiserfs.
<cadre type="note">Noter que des fichiers d'une partition en reiserfs montée sans l'option attrs
(ou la recompilation du noyau) peuvent recevoir des attributs étendus : ils seront bien enregistrés mais n'auront aucun effet. La commande de modification d'attributs, chattr, ne renverra donc aucun message d'erreur sans pour autant que les attributs soient pris en compte. Ce détail peut avoir des répercussion pour la sécurité du système : on peut, à tort, croire protéger des fichiers.</cadre>
Types d'attributs
Selon la norme POSIX.1, tout fichier possède les permissions en lecture, écriture et exécution. On peut leur adjoindre des attributs supplémentaires, qui s'imposent à tous les utilisateurs (dont root, qui peut cependant annuler ces attributs) quand ils modifient les actions qu'on peut avoir sur eux. Certains attributs sont encore expérimentaux (octobre 2005) et nécessitent de patcher le noyau pour qu'ils aient un effet réel.
- append only (a), « ajouter seulement » ─ réservé à root
- Protège le fichier contre la suppression de contenu : on ne peut que lui en ajouter.
- compressed (c), « compressé » ─ expérimental
- Le fichier est automatiquement compressé ─ si c'est utile, et avec un format de compression le plus efficace ─ quand il est stocké. La décompression lors de la lecture et la compression des données ajoutées au fichier par la suite se font à la volée, de manière transparente pour l'utilisateur (la commande
ls -l
, par exemple, montre la taille décompressée). - Cet attribut appliqué à un répertoire ne le compresse pas mais fait se compresser automatiquement tout nouveau fichier qu'on y crée.
- no dump (d), « pas de sauvegarde »
- Un fichier ainsi marqué sera ignoré par la commande de sauvegarde dump (qui ne fonctionne que pour ext2 et ext3). Cet attribut est utile pour empêcher la sauvegarde par dump d'un fichier ou répertoire situés dans un système de fichiers monté avec l'option
dump
positionnée à1
(cf fstab). - immutable (i), « immuable » ─ réservé à root
- Protège le fichier contre toute modification (suppression, modification, déplacement, changements de permissions), même par root, et empêche qu'on crée un lien vers lui. Seule la modification des attributs étendus est permise à son propriétaire et seul root peut enlever l'attribut « immuable » d'un fichier.
- Cet attribut est sans doute l'un des plus intéressants.
- data journalling (j), « journalisation des données » ─ réservé à root
- Cet attribut n'est utile qu'avec une partition en ext3 montée avec les options de journalisation des données
data=ordered
(montage par défaut) oudata=writeback
pour simuler une journalisation du typedata=journal
, où les données sont écrites dans le journal avant de l'être dans le fichier lui-même. Consulterman mount 8
pour plus de détails sur les mécanismes de journalisation d'ext3. - Sur une partition ext3 en mode
data=journal
, cet attribut est ignoré, de même que sur les partitions en ext2 et reiserfs, le premier type n'étant pas journalisé, le second l'étant d'une manière incompatible. - secure deletion (s), « effacement sécurisé » ─ expérimental
- Un fichier portant cet attribut est non seulement « effacé » mais en plus les blocs qu'il occupait dans le système de fichiers sont recouverts de zéros pour éviter qu'on puisse récupérer les données malgré l'effacement.
- Normalement, effacer un fichier consiste seulement à détruire toute référence vers l'espace occupé par les données de ce fichier dans la partition. Il n'est cependant pas question de détruire physiquement les données elles-mêmes, sauf si le fichier possède cet attribut, auquel cas non seulement il n'est plus accessible mais en plus tous ses bits sont réécrits.
- no tail-merging (t)
- undeletable (u), « ineffaçable » ─ expérimental
- Lors d'un effacement, les références vers l'espace du système de fichiers qui contient les données sont détruites, mais pas les données. Sans ces références, cependant, l'espace anciennement réservé peut être utilisé par des fichiers nouvellement créés ou ayant été augmentés. Dans ce cas, il n'est plus possible de récupérer les données en question.
- L'attribut « ineffaçable » permet de préserver les blocs qui contenaient les données de façon à ce qu'on puisse les récupérer si besoin est. L'espace-disque n'est donc pas libéré.
- no atime updates (A), « pas de mise à jour de la date de dernier accès »
- À chaque fois qu'on accède à un fichier, la date du dernier accès est modifiée. Dans un système de fichiers dans lequel existent de nombreux fichiers auxquels on accède souvent (c'est le cas pour les serveurs de news), ces modifications peuvent ralentir le système.
- Donner à un fichier l'attribut no atime updates permet d'éviter ce problème. Noter que la même option existe lorsque l'on monte une partition dans l'arborescence globale (
mount -o noatime
), option que l'on peut inscrire dans /etc/fstab. - synchronous directory updates (D), « mise à jour synchone des répertoires »
- synchronous updates (S), « mise à jour synchrone »
- Ces deux attributs ont un effet similaire. Le premier sert aux répertoires, le second aux fichiers. Les données des répertoires et fichiers concernés sont mises à jour dès qu'une modification a eu lieu (et non en différé, comme c'est le cas par défaut pour ext2 et ext3). C'est l'équivalent des options de montage
mount -o sync
etmount -o dirsync
(qu'on peut aussi passer dans fstab) mais pour une sous-partie de l'arborescence et non la partition entière. - top of directory hierarchy (T), « répertoire racine » ─ réservé à root
- Cet attribut indique au répartiteur de blocs Orlov (ou Orlov block allocator, utilisé par le noyau Linux pour les systèmes de fichiers ext2 et ext3 depuis la version 2.5.46) que le répertoire concerné doit être considéré comme un répertoire racine de la hiérarchie des répertoires.
- L'allocateur de blocs est un processus propre au système de fichier permettant de répartir les blocs de données des fichiers dans l'espace disponible tout en garantissant une qu'il ne se produira pas une trop grande fragmentation. Pour cela, on place généralement dans un même groupe de cylindres du disque dur les blocs de fichiers dépendant d'un même répertoire. Dans le cas contraire, les données risquent d'être éparpillées, voire fragmentées (les blocs d'un même fichier sont alors répartis sur plusieurs cylindres non contigus). On ne peut cependant prévoir à l'avance de quel espace aura besoin un répertoire racine. Il pourrait ne contenir que peu de fichiers ou, au contraire, une arborescence complète et chargée. Le répartiteur Orlov prend donc soin d'éloigner le plus possible les uns des autres les répertoires racines, pour qu'ils disposent d'un espace suffisant où croître.
- Ajouter cet attribut à un répertoire permet au répartiteur de le traiter comme un répertoire racine, même s'il n'en est pas un, et de le placer loin des autres répertoires racines. Il est donc utile avec des sous-arborescences de fichiers complexes et lourdes qui risqueraient d'être fragmentées.
Commandes
ll existe deux commandes pour accéder aux attributs étendus : lsattr (list attributes, « lister les attributs ») chattr (change attributes, « changer les attributs »). Toutes deux sont incluses dans le paquetage e2fsprogs.
chattr
Cette commande s'utilise quasiment comme un chmod simplifié : en effet, les attributs ne peuvent être indiqués que sous forme symbolique (dont les codes sont donnés ci-dessus) et non au moyen d'un éventuel nombre octal.
Ainsi, pour donner un attibut, on utilise la commande suivie de + et du code ; par exemple, rendre un fichier « immuable » se fait avec la commande (en root) :
chattr +i fichier
Retirer un attribut requiert l'opérateur -
. La commande pour enlever l'attribut « immuable » est donc :
chattr -i fichier
Enfin, pour faire en sorte qu'un fichier n'ait que l'attribut « immuable » :
chattr =i fichier
La commande peut être utilisée de manière récursive au moyen de l'option -R
: pour rendre toute une hiérarchie immuable, il suffit de :
chattr -R + i répertoire/
lsattr
Cette commande fonctionne comme ls et prend les options -R
(listage récursif), -a
(tout afficher) et -d
(lister les répertoires comme des fichiers), entre autres ; lsattr peut afficher des attributs qu'on ne peut modifier avec chattr
L'affichage est simple : chaque attribut du fichier est représenté par son code, une absence d'attribut l'étant par un -
.
Ainsi :
chattr +ASacDdijsTtu fichier
lsattr fichier
suS-iadAc----j-tT fichier
L'attribut D
n'a pas été appliqué, puisque le fichier n'est pas un répertoire.
Les autres valeurs que peut indiquer lsattr s'intercalent dans les espaces vacants : E, I, X et Z.
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© 28.10.05 Vincent Ramos
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